Mardi 22 mai 2018, le Muséum national d’Histoire naturelle (MNHN) et la Fondation d’entreprise ENGIE ont remis le Prix Fondation d’entreprise ENGIE « Talents de la recherche au Musée de l’Homme » à deux équipes de chercheurs du Muséum national d’Histoire naturelle :
- Anne Fournier et Manuel Valentin pour leur projet « Vivre la perte de biodiversité végétale au Burkina Faso »
- Vincent Lebreton et Sahbi Jaouadi pour leur projet « Résiliences climatiques et territoriales des sociétés dans les régions semi-arides et arides de la Tunisie depuis le Néolithique ».
Nouveau Prix, ouvert aux chercheurs du Muséum national d’Histoire naturelle, le Prix Fondation d’entreprise ENGIE « Talents de la recherche au Musée de l’Homme » permet d’attribuer une bourse annuelle à un chercheur travaillant sur des thématiques en lien avec le Musée de l’Homme. L’objectif est d’impulser des projets interdisciplinaires innovants et une dynamique collaborative de recherche autour de la thématique suivante : « Résilience des sociétés face aux changements climatiques présents et passés ».
Allouée chaque année pendant trois ans, cette bourse de recherche est attribuée par un jury composé de scientifiques du MNHN, de représentants de la Fondation ENGIE et de personnalités extérieures. Le chercheur lauréat du Prix s’engage à participer à la diffusion de son projet de recherche auprès du grand public, par exemple sous la forme de conférences, de publications ou de présentation au sein du Balcon des sciences du Musée de l’Homme.
Grand mécène du Muséum national d’Histoire naturelle depuis plus de dix ans et Mécène Fondateur du Musée de l’Homme depuis 2015, la Fondation ENGIE a souhaité poursuivre son engagement en soutenant les « Talents de la recherche au Musée de l’Homme ».
Résiliences climatiques et territoriales des sociétés dans les régions semi-arides et arides de la Tunisie depuis le Néolithique (RÉSIST)
Le projet RÉSIST vise à documenter la résilience des populations présentes dans les régions arides et semi-arides tunisiennes au cours des dix derniers millénaires. Il permettra d’identifier les épisodes de changements climatiques rapides, de caractériser les effets du changement climatique actuel et les dégradations des ressources environnementales associées et d’étudier les réponses socio-culturelles de ces populations aux contraintes environnementales.
Les steppes de la Tunisie centrale sont des milieux très vulnérables aux variations de l’aridité et à l’impact croissant des activités humaines. De nombreux vestiges archéologiques témoignent d’une présence humaine pérenne dans ces paysages steppiques depuis le Néolithique, avec des modes d’occupation du territoire, de productions économiques et d’organisation sociale et culturelle variables selon que les sociétés sont nomades, semi-nomades ou sédentaires. Ces comportements révèlent une adaptation pluriséculaire et une forte capacité de résilience des sociétés face aux aléas climatiques. Cependant, les importants changements socio-économiques survenus en Tunisie au XXe siècle ont accentué la dégradation des ressources environnementales et constituent une menace majeure pour les modes traditionnels d’exploitation des terroirs. L’approche pluridisciplinaire de l’étude croise les données historiques et archéologiques avec les archives paléoenvironnementales et paléoclimatiques dans ces milieux arides. Le projet pourra ainsi mettre en évidence la diversité de ces systèmes sociaux-écologiques et des formes d’adaptation des populations sur le long terme (effondrement, réorganisation spatiale, changements économiques et culturels, accroissement de la complexité sociale ou politique…).
RÉSIST met en avant une approche naturaliste des sciences humaines et sociales pour aborder sur le long terme (les 10 derniers millénaires) les défis sociétaux posés par la désertification et la gestion durable des ressources en Tunisie centrale.
Vivre la perte de biodiversité végétale au Burkina Faso (VEGEFASO)
Le projet « Vivre la perte de la biodiversité végétale au Burkina Faso » (VEGEFASO) propose d’étudier les conséquences culturelles de la perte en biodiversité végétale de ces 50 dernières années au Burkina Faso. Il étudiera les stratégies d’adaptation de deux sociétés à rituel masqué : les Bwaba de la région de Bondoukuy et chez les Sèmè de la région d’Orodara. Cette étude pourra ainsi montrer comment les nécessités cultuelles peuvent influer sur les processus de résilience face aux conséquences du changement climatique.
Depuis les graves sécheresses climatiques des années 1970 et l’extension des zones cultivées sous la pression de « réfugiés climatiques » venus du nord, les paysages des savanes du centre et de l’ouest du Burkina Faso se transforment. De nombreuses plantes se raréfient ou disparaissent. Or elles sont, pour de nombreuses sociétés (Bwaba, Dafing, Sèmè…), des supports très importants de leur culture. Elles servent à confectionner leurs masques : faces de bois, vêtements de fibres et accessoires. Par exemple, les masques les plus sacrés des Bwaba sont presque entièrement constitués de feuilles d’Isoberlinia doka, arbre en voie de disparition. Indispensables lors des initiations masculines, les masques constituent un patrimoine identitaire. Certaines associations les investissent aujourd’hui comme « ambassadeurs » des cultures locales. Les gardiens des traditions recherchent des solutions pour faire face à la disparition des espèces végétales à usage cultuel.
Des consensus s’établissent à l’échelle locale pour la mise en place de mesures de protection d’espaces naturels spécifiques et de reboisement pour certaines des espèces sauvages. À ce titre, le Burkina Faso peut être un laboratoire précurseur de la capacité pour démontrer la capacité de résilience des sociétés dites traditionnelles.